vendredi 31 décembre 2010

Agnostiques, athées, sceptiques et révoltés, mes frères.

Certains estiment qu'à propos de Dieu on ne peut rien dire de sûr, qu'on ne saurait affirmer ou infirmer son existence, qu'en définitive l'objet "Dieu" est méconnaissable, et que l'attitude la plus sage est de se taire, ou de suspendre son jugement. Comme parfois, je vous comprends, mes chers agnostiques; comme parfois je suis des vôtres. Et plus particulièrement aux heures sombres, alors même que la foi devrait m'aider et qu'elle ne m'est d'aucun secours, aux heures où tremblent mes os et où mon esprit se brouille. Et si après tout, Dieu ne serait pas Dieu, si après tout il n'était qu'une belle idée...une terrible idée, puisqu'elle ne m'aide pas à vivre à ces heures-là. J'aimerais alors suspendre mon jugement, tandis que résonne cette parole du Christ en croix : "Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m'as-tu abandonné?".

D'autres vont plus loin - je crois qu'ils sont peu nombreux cependant - et affirment que Dieu n'existe pas, que le ciel est vide et la terre pareillement, que le seul sens de l'existence humaine et bien c'est celui que nous lui donnons dans l'espace imparti entre la naissance et la mort. Le reste c'est de la fable. Parfois aussi, je me sens proche de vous, athées. Quand je vois ce corps mort sur la croix, ce corps sans vie, cette bouche muette, la bouche de celui qui prétendait être le Fils de l'Homme, qui disait de si belles choses et qui est, finalement, réduit à rien, un cadavre dégoulinant de sang, d'humeurs et de sueur. Un cadavre de plus sur la surface de la terre. Je me dis parfois qu'après tout le Ciel est vide et que la terre n'est pas beaucoup plus pleine, que tout est absurde et que la seule chose qui ait un sens, c'est ma manie de mettre du sens partout. Une manie oui, une folie, le sens serait donc une pure folie, de laquelle il faut sortir, et comment? Par un excès de morale ? Par l'étourdissement des sens? Les paradis artificiels comme disait l'autre? Devenir un chien? Après tout, il serait peut-être mieux d'être une bête...

D'autres encore, ne sont ni athées, ni agnostiques, ils sont sceptiques. Ils croient ou du moins sont disposés à croire, mais sont toujours pris par le doute. Et si? Et si? Semble être leur obsession. Ils croient qu'un Dieu est, qu'il est architecte, et si ? et si? Ils croient parfois même que le Christ était un grand homme, un prophète, et si ? et si? Moi aussi, parfois, je me dis et si? et si? Et si après tout, je me racontais des histoires? Hein? Alors moi qui suis sceptique à mes heures perdues, je comprends les et si ? et si?, je fais mieux je suis moi-même un et si ? et si?


Enfin, une dernière catégorie de gens avec qui je sympathise est celle qui regroupe les révoltés, ils ne savent pas s'ils sont athées, sceptiques, ou agnostiques, ils n'ont jamais eu le temps de se poser la question, ils sont pris pas leur colère, leur révolte. Dieu existe? Je ne sais pas, mais je lui en veut. Dieu est-il? Certainement pas, mais je lui en veux. Comment peut-on en vouloir à quelqu'un dont on doute de l'existence ou dont on nie l'existence? Je ne sais pas mais je connais des gens comme ça. Ils sont épidermiques dès qu'il s'agit de religion, perdant leur sang-froid, leur raison et devenant soudain tout colère, comme si Dieu leur avait fait un mal certain et personnel. Je les comprends malgré tout, car parfois je suis moi-même révolté, révolté contre le silence de Dieu, contre certains comportement de ses tenants lieu et ma colère ne se calme point lorsque je regarde Jésus armé de cordes et chassant du Temple les vendeurs.

Alors mes frères athées, agnostiques, sceptiques de toutes les eaux, et révoltés de tous poils, je suis parfois proche de vous, moi qui pourtant suis croyant et  professe la foi catholique. Pour paraphraser une carmélite, peut-être avez vous raison après tout, peut-être qu'il n'y a rien à espérer en dehors de cette vie, mais personne ne sera là pour nous le dire, si, par contre, malgré les doutes, les nuits, les erreurs, les révoltes, j'ai raison en ma foi, et bien quelqu'un, une fois le rideau tombé, nous recevra.

dimanche 26 décembre 2010

Attention ça tourne ou un autre visage du Père Noël.

Noël, pour cette année c'est fini. Enfin, non, pas tout à fait, puisque le réveillon de la saint Sylvestre est, en quelque sorte, l'appendice de la fête natalice. A moins que ce ne soit l'inverse : la fête de Noël est devenue la répétition générale du grand amusement du 31 décembre. Quoi qu'il en soit, les deux fêtes sont désormais bien liées, articulées, l'une à l'autre dans une octave de joie et de consommation. C'est une espèce de retour aux origines, bien avant que l'Eglise ait eu la bonne idée de choisir la fête du solstice d'hiver, du Sol Invictus, comme date de la célébration du Vrai Soleil Invaincu : le Christ. Les romains connaissaient une autre fête beaucoup plus carnavalesque, avec échange de cadeaux, celle des Saturnales. Eh bien, le paganisme ayant repris ses droits, nous voilà retournés aux Saturnales et aux fêtes du Solstice. N'ai-je pas entendu hier de la bouche de Karen Cheryl une étymologie très scientifique de "noël"? D'après cet éminent historien des religions, le mot viendrait du celte (sic), "noeva el", qui veut dire, nouveau soleil. Mais c'est bien sûr. Le problème c'est que cette explication, qui satisfera les amateur de gui, est parfaitement fausse. Noël vient du latin Natalis sous entendu dies, et qui renvoie au jour de naissance, non pas du soleil, mais du Christ.

Après la fête du gros lutin rouge - que je n'aime pas, l'affreux bonhomme débile, et débilitant- on en vient donc à la fête de Saturne. L'ennui avec Saturne c'est que c'est le dieu de la mélancolie et des idées noires. Avec lui les choses commencent toujours par nous tourner la tête, un petit air de joie, des bullettes, et puis vlan, par derrière, le bouffeur d'enfant, nous tombe dessus.  Serpentins, cotillons, joie pour l'année qui fini, joie pour celle qui commence, qui pour beaucoup d'entre nous sera la dernière sur la face de la terre, et pour certains, sans retard, le jour-même, dans l'acte-même de la célébration de ce passage. Chaque année, en effet, il y a des morts pendant ce réveillon. Saturne n'est pas un dieu facile, et son appétit est énorme.

Allez bonne année.

mercredi 22 décembre 2010

L'arachnophobie est-elle un crime?

La question peut paraître incongrue, pourtant, par les temps qui courent, elle mérite d'être posée. En effet, toute phobie, aujourd'hui, s'apparente au  racisme, notion elle-même distendue à l'extrême, aussi, sans être trop absurde, on peut dire que l'arachnophobe est raciste. J'exagère à peine.

Il est toujours intéressant de revenir à la définition des mots et à une définition la plus précise possible. Phobie, par exemple, vient du grec phobos, peur, et une peur irraisonnée comme le sont d'ailleurs beaucoup de peurs. Le terme de "phobie", a dans notre langage une connotation psychologique voire psychiatrique. Le phobique est quelqu'un qui est le sujet d'une peur irraisonnée et qui le fait souffrir. Puisque peur il y a, il y a répulsion vive de ce qui cause la peur, celle-ci étant première par rapport à celle-là. Cependant, le langage du tout venant, du fameux homme-de-la-rue, a inversé les rapports voire a tout simplement minimisé la notion déterminante de peur, pour ne retenir que la répulsion, qui du coup n'est fondée sur rien, si ce n'est sur elle-même, elle devient une espèce de haine gratuite.
Le racisme quant à lui est un "ensemble de théories et de croyances qui établissent une hiérarchie entre les races, entre les ethnies. Plus particulièrement, il s'agit aussi d'une "doctrine politique fondée sur le droit pour une race (dite pure et supérieure) d'en dominer d'autres, et sur le devoir de soumettre les intérêts des individus à ceux de la race." Souvent ce racisme théorique est accompagné d'une hostilité et de violence réelles. Le racisme est une forme certaine de la haine. On voit donc comment phobie et racisme se rencontrent sur le terrain de la haine. Cependant, n'est pas du racisme la haine des roux, des gros, des homosexuels, des femmes, des chrétiens, des musulmans, des enfants, des vieillards, des manchots, de ceux qui chantent faux et des araignées. Si une phobie peut virer au racisme, toutes les phobies ne sont pas du racisme, et toutes les haines non plus.


L'arachnophobe n'est donc pas un raciste, mais un pauvre diable souffrant d'une peur panique et, en toute logique, d'une répulsion pour l'objet de sa terreur. Qu'en est-il maintenant, de l'islamophobe ? Insulte très en vogue en ce moment. Islamophobe est-il raciste? Pas forcément. Il peut l'être, mais ne l'est pas conséquemment à son islamophobie. Islamophobie n'est donc pas un racisme, ni un des visages nécessaire de celui-ci. Islamophobie est-il de la haine? Pas forcément. Il peut l'être, mais ne l'est pas conséquemment. S'il l'est, c'est en sus. Michel Onfray est un christianophobe notoire, personne n'a jamais songé à le traiter de raciste. Il n'aime pas le christianisme pour les raisons qu'il donne, il n'aime pas disons la "philosophie" chrétienne et ce qu'elle implique, c'est son droit le plus strict, personne ne songerait à le traîner en justice pour ce fait. Et aucune association catholique n'en a eu l'idée, ce qui serait ridicule. On peut ne pas être d'accord avec Onfray, contredire ses arguments, mais il faut lui reconnaître le droit de dire ce qu'il entend vouloir dire, même si ce qu'il dit est parfaitement faux. Le régime est le même pour l'islamophobie, enfin, il devrait être le même, car il semble que cela ne soit pas le cas. On signale des musulmans priant dans la rue : islamophobie. On signale le port exagéré voile : islamophobie. On signale le fait d'avoir des horaires de piscines différents pour les hommes et les femmes : islamophobie. On signale la lente "halalisation" des cantines et de certains restaurants rapides : islamophobie. Etc. Cependant, toute ces inquiétudes sont fondées sur les exceptions faites aux coutumes et aux usages communs des pays dans lesquels nous vivons, les unes et les autres parfois acquis de haute lutte. Rien qui ressemble à de la haine là-dedans, mais bien à une peur de voir, petit à petit, s'instaurer un état d'exception pour une communauté donnée, qui, visiblement, n'est absolument pas prête à se mettre en cause, ni ne peut, le voudrait-elle.


L'islam est une des grandes religions du monde. Il a donné naissance à des cultures riches, parfois à des courants spirituels féconds - bien que presque toujours hérétiques. L'islam possède sans nul doute des richesses qui lui sont propres et qui font son génie. Mais il est de constater que ce génie-là, n'est pas forcément partagé par tous les musulmans, loin s'en faut. Qui faut-il blâmer? Les fidèles de Mahomet qui méconnaissent leur propre tradition? Les excitateurs radicaux? L'islamisme qui n'en fini plus d'être requalifié? L'islam lui même, en tant qu'épistémologie et herméneutique? Nous, qui n'arriverions pas à intégrer l'autre? Nous, dont le racisme est prégnant? Avant de répondre, il faut tant que faire ce peut savoir de quoi on parle, et ne point faire comme Monsieur Hammon, qui trouve insoutenable que des femmes et des hommes prient dans la rue. Mais aucune femme ne prie avec les hommes en islam et encore moins dans la rue. Monsieur Hammon, comme beaucoup, connaît mal le sujet.

mardi 21 décembre 2010

Que deviendra le grec?

Jacqueline de Romilly est morte. Laissons de côté le refrain de la "grand dame", de la première pour ceci, de la seconde pour cela, en définitive, tout cela n'a aucune espèce d'importance. Avec cette mort, c'est une certaine conception de la culture qui meurt un petit peu. Elle qui avait dédié sa vie à l'étude de la langue et de la culture grecques emporte avec elle une grand part de ses rêves et de son idéal humain. A l'instar d'une Simone Weil, elle n'avait cessé, bien que de manière très différente, d'attirer l'attention sur le caractère fondamental de la connaissance de la Grèce, dans laquelle nous puisons encore beaucoup. Non pas tant, c'est mon opinion, en ce qui concerne la démocratie - antienne éculée - la grecque ne ressemblant aucunement aux nôtres, mais par un rapport à l'histoire, au tragique et à la raison. La Grèce antique a été pour l'occident une matrice, et comme pour toutes les matrices, on en perd le souvenir, pire même, on les méprise, préférant vivre sans mémoire, sans racines, sans dettes, sans attaches : mais on ne pense jamais sans une référence aux autres.

samedi 18 décembre 2010

In-nocence du Monde?

Par souci de vérité et d'impartialité, je reproduis ici le communiqué du parti de l'In-nocence présidé par Renaud Camus, écrivain, romancier, essayiste, diariste. Je n'ai aucun lien avec ce parti, je précise. L'horreur de la mauvaise fois, des procès d'intention, des mensonges, de la médisance, de la désinformation, coutumières de notre époque, et surtout dans ses organes, voués par devoir, précisément, à l'information, est ma seule motivation.


Communiqué n° 1151, vendredi 17 décembre 2010
Sur une bassesse du journal  Le Monde
Le parti de l'In-nocence souligne que le journal Le Monde, au lendemain de la révocation d'Eric Fottorino de ses fonctions de président du directoire du groupe Le Monde, inaugure une nouvelle phase de son histoire par une bassesse qui rassurera ceux qui craignaient une trop abrupte rupture avec la tradition du journal. Prétendant traiter de l'ouvrage De l'In-nocence, le journal, en intitulant son article "Renaud Camus, candidat de l'Occident" — quand on connaît les connotations de ce dernier terme dans l'histoire politique moderne de notre pays —, expose clairement sa volonté de nuire et de désinformer. C'est d'autant plus éclatant que dans un entretien que Le Monde, selon ses méthodes coutumières, s'est bien gardé de publier, Renaud Camus, interrogé par un journaliste sur la signification pour lui de ce terme dont son parti et lui usent assez peu, avait répondu, pris par surprise, « l'amitié pour le soir » !

Le parti de l'In-nocence relève au demeurant que le corps de l'article, en qualifiant Renaud Camus de « romancier du moi (...) connu pour son exploration de la subjectivité homosexuelle » ne témoigne pas beaucoup plus que de cette méconnaissance hargneuse, insinuante et sûre d'elle dont l'ex-"journal de référence" s'est fait une spécialité, avec une constance haineuse, à l'égard de tous ceux qui ont un jour contesté sa déontologie et son autorité.


jeudi 16 décembre 2010

Incroyablement PS.

http://www.lemonde.fr/politique/article/2010/12/16/les-fideles-ne-prient-pas-dans-la-rue-par-plaisir_1454111_823448.html#xtor=RSS-3208
Soit elle est bien informée, soit elle dit n'importe quoi. Qu'elle soit du PS, me fait pencher tendancieusement vers la seconde solution : elle dit n'importe quoi. Certes, et là elle a raison, ce n'est pas le plaisir qui pousse "les fidèles" dans la rue, non bien sûr, mais s'ils s'y trouvent, venant, comme c'est le cas à Paris, des départements voisins, ce n'est certainement pas non plus par pure nécessité.

Ne pas lier islam et immigration, on le voudrait bien, mais tout de même la réalité est là, le réel dans toute sa splendeur, et il faut vraiment être du PS pour ne pas le voir, et dire que l'islam et immigration ne sont pas liés. Encore reste-t-il à préciser comment et pourquoi. Mais ce n'est certainement pas en niant la réalité qu'on y parvient.

Le PS est totalement fou, et se berce de douces illusions... son irénisme, son angélisme, ses bons sentiments, sa bobotitude, nouvelle bourgeoisie, le conduisent à sa perte. Quand on dénie le réel, le réel vous revient dans la figure au prochain tour.

Les érections du Christ

Revenons, une nouvelle fois, au phallus dont il avait été question il y a quelques jours.
A coup sûr, le christianisme a rompu avec la représentation phallique et surtout avec son culte. Le christianisme a horreur des fétiches et des fétichismes. A l'origine du mot, il y a le portugais "feitiço", ensorcellement, qui lui vient de "feiticeiro" jeteur de sorts. Le fétiche est un objet, naturel ou façonné, considéré comme le support ou l'incarnation de puissances supra-humaines et, en tant que tel, doué de pouvoirs magiques dans certaines religions primitives. Le fétichisme est donc la croyance au pouvoir magique d'un objet ou d'une chose de la nature. Cette croyance crée une dépendance, le fétichiste est en quelque sorte ensorcelé, envoûté. 
Le christianisme dans son entreprise de libération de l'humain, rejette toute forme de dépendance à un quelconque fétiche ou à un quelconque jeteur de sort. La relation fondamentale dans le christianisme n'est pas celle de l'esclave, mais celle de "fils". On ne saurait penser, en régime chrétien, la relation au religieux qu'en terme de filiation, de partage de la même nature, du même héritage. Dieu n 'est pas un fétiche, la divinité est Père, et elle instaure un lien de liberté et non pas d'aliénation. Dans un tel contexte, la représentation du phallus, ne veut strictement rien dire. Elle ne renverrait qu'à une partie de la personne humaine et non plus à toute la personne, une partie que l'on va exalter aux dépens du reste, une partie que l'on va hypostasier et vénérer pour elle seule. 

Le phallus évoque la puissance et la fécondité, il en est le symbole. Les religions primitives, mais aussi la romaine, lui vouait un culte fétichiste. Le christianisme rejette cela, cependant, par un détour, qui est chez lui une habitude, il récupère le symbole phallique, mais défétichisé. 

Le Christ Ressuscité est le nouveau phallus, non plus dans la représentation réaliste de son membre viril dressé, mais dans toute sa personne érigée, debout, au sortir du tombeau. La "surrection"  de l'homme crucifiée est la réalisation chrétienne du phallus : ce n'est plus le membre masculin qui est signifiant, mais toute la personne humaine, passée de mort à vie, qui désormais signifie la puissance et la fécondité.

"Quand je serai élevé de terre j'attirerai tout à moi". Cette phrase de l'évangile de Jean, récapitule bien les choses. L'élévation christique est le mouvement qui commence à la crucifixion qui passe par la résurrection et qui s'achève par l'ascension. Trois érections donc, chacune ayant sa symbolique propre, et toutes ensembles composant une chaîne signifiante. Les érections christiques sont - osons le dire- une profonde mutation de la représentation phallique et de sa signification. Cette mutation, anti-fétichiste, a des conséquences sur la manière d'envisager la chair et la sexualité. L'une et l'autre seront débarrassées de tout fantasme de puissance, ramenées à leur réalité de déréliction et simultanément exaltées comme capax dei.

C'est ce que nous donne à penser la chair crucifiée et la chair ressuscitée du Christ. 


En résumé donc, le phallus n'a pas disparu du christianisme il a été réintégré à la totalité de la personne, et c'est désormais toute la personne qui est phallique. Le phallus est à la fois signe de faiblesse et de puissance de vie. Le phallus n'est plus aliénant mais un est le Fils qui libère et qui détourne de lui.


Ce qui ouvre des perspectives aux femmes qui ne sont plus sous l'emprise phallique dans laquelle les maintenait le culte fétichiste du phallus. Tout culte phallique est une exclusion des femmes, la représentation réaliste du phallus, organe masculin, exclus d'office les femmes, dans leur anatomie d'abord, dans leur existence ensuite. La révolution chrétienne est aussi une libération de la femme.

mardi 14 décembre 2010

De l'angoisse à la paix

A l’automne 1568, le frère Jean de Yepes, après sa rencontre avec Thérèse de Jésus, s'installe à Duruelo, prend le nom de Jean de la Croix, et commence sa vie de carme déchaussé, selon la réforme de la sainte d'Avila.

La vie et la doctrine de Jean de la Croix sont pour le christianisme d'une importance capitale. Ses traités sont des exemples parfaits de la connaissance de la psychologie humaine, psychologie qui est toujours de la partie quand il s'agit de religion ou de spiritualité. Aussi, Jean de la Croix, encourage à se méfier des biens matériels, si l'on veut acquérir des biens spirituels mais aussi des biens spirituels eux-mêmes, qui, parfois, bien plus fort que la matière, enferme l'âme humaine.

" Pour parvenir à ce que tu ne goûtes pas, tu dois passer par où tu ne goûtes pas. Pour parvenir à ce que tu ne sais pas, tu dois passer par où tu ne sais pas. Pour parvenir à posséder ce que tu ne possèdes pas, tu dois passer par où tu ne possèdes pas. Pour parvenir à ce que tu n'es pas, tu dois passer par ce que tu n'es pas.(...) Pour parvenir en tout au tout, tu dois te quitter totalement en tout, et, quand tu parviendras à le posséder totalement, tu dois le posséder sans rien chercher."

On le voit, Jean de la Croix, procède par une méthode apophatique et paradoxale, propre à la mystique chrétienne. Si ce qui importe est bien le tout, il faut passer par le tout du rien, et le rien du tout, pour le posséder et une fois le tout possédé, il faut encore le posséder comme ne possédant rien. Aussi tout et rien, sont les deux pieds du spirituel qui le font avancer dans ce que le mystique appelle les nuits : nuit des sens et nuit de l'esprit. La nuit est le régime habituel de la foi, qui adhère sans voir, sans sentir, qui aime, sans toucher, qui espère sans parole. La nuit est plus aimable que le plein jour, car elle conduit plus sûrement vers le tout :

"Par une nuit obscure
angoissée, d'amour enflammée,
oh, bienheureuse aventure !
Je sortis sans être remarquée
Tandis que ma maison étant apaisée

Dans cette heureuse nuit
Je me tenais dans le secret; nul ne me voyait
Et je n'apercevais rien
Pour me guider, que la lumière
Qui en mon cœur brillait



Cette lumière me guidait
Plus sûrement que la lumière du milieu du jour
Là où m'attendait
Qui je savais bien
En un lieu ou l'on ne voyait personne" Poème de la Nuit Obscure.


Jean de la Croix, par sa doctrine, exemplifiée par sa vie, est l'un des maîtres spirituels chrétiens le plus sûr , le chantre des nuits spirituelles et des angoisses qu'elles engendrent, mais aussi celui de l'amour réel, sans illusion, dépouillé, pour ainsi dire, de son objet. Il conduit à une pratique de la foi, de l'amour, et de l'espérance, dans ce que ses vertus théologales ont de plus radical et de simple : sans imagination, sans support, au-delà du concept.

lundi 13 décembre 2010

La mort de Dieu et la nécessaire critique

Depuis Nietzsche, tout le monde le sait, Dieu est mort, et la nouvelle s'est répandue comme une trainée de poudre. La nouvelle non pas de la mort de Dieu, celle-ci était déjà connue des chrétiens, puisque en Jésus-Christ, Dieu est mort, mais la nouvelle que quelqu'un hors-champ chrétien en prenait conscience.
La mort de Dieu pour un chrétien a un sens, et pour celui qui est hors-champ chrétien un autre sens, et les deux sens sont parfaitement incompatibles.
Quoi qu'il en soit, depuis le philosophe du gai savoir, le christianisme, qui donc déjà se coltinait la mort de Dieu, a dû une nouvelle fois, sur un autre niveau, cette fois, se la prendre en pleine tête. Mais on sentait la chose venir à vrai dire, depuis le XVIe siècle surtout, on sentait bien, que quelque chose n'était plus comme avant, que la donne était changée. Le christianisme, qui est la matrice de la pensée occidentale, a dû se confronter, depuis ses origines, mais plus encore depuis les lumières, et davantage encore depuis les maîtres du soupçon, à la critique constante. Critique que lui-même aura contribué à engendrer, à produire, à en être source, non pas tant en prêtant le flanc, mais par un engendrement quasi consubstantiel.
La critique, en effet, est inhérente au christianisme, qui a dû l'intégrer pour définir son dogme. Définir, c'est-à-dire, donner une articulation intelligente à sa foi. La foi précède la définition, et la définition donne un cadre notionnel à la foi. Sans un travail de critique cela n'aurait jamais pu se faire. De ce travail théologique sont nés des concepts qui aujourd'hui encore fondent notre conception du réel. Le christianisme donc a dû pratiquer une intelligence critique à l'interne et se confronter à la critique à l'externe. De cette confrontation sont nées notre culture occidentale et la société dont nous avons héritée, pour le pire et le meilleur.
Dans ce contexte, l'islam, religion a-critique par nature, n'a jamais connu ce régime là, ni chez lui, dans les terres traditionnellement musulmanes, ni ici en terres, pour lui étrangères jusqu'il y a peu. Aussi, le cadre que nous avons mis en place par l'exercice critique issu du christianisme, et parfois contre lui, est parfaitement inadapté à l'islam qui vient de l'extérieur de ce dispositif, qui l'ignore et qui n'y trouve aucune raison de s'y soumettre.
Il l'ignore parce que son génie est radicalement différent du génie chrétien. L'islam ignore toute forme de mort de Dieu, tout forme de relativisation de l'absolu, l'absolu pour lui est toujours absolument absolu, dans une espèce de redondance. Il l'ignore parce que son type d'exégèse ne peut pas être critique non plus. La révélation coranique est la parole même de Dieu, les ipsissima verba de l'absolu, comment cela souffrirait une critique? L'islam ne trouve aucune raison dans notre raison. La raison, au sens ici de contenu informant, est née d'une pratique critique du christianisme qui met en contact, "relationne", l'absolu et le relatif, joue avec le paradoxe, notre raison est donc paradoxale, la raison islamique, quant à elle, est toujours "métadoxale". La critique musulmane, si elle existe, ne peut être située qu'au-delà de la doxa, un au-delà en réalité qui l'ignore. Ainsi par exemple la doctrine de l'abrogation, dans son interprétation orthodoxe : lorsque deux versets coraniques sont contradictoires le dernier abroge le premier. L'exercice critique se résume donc à un exercice chronologique qui ne met pas en cause le fait que Dieu puisse effectivement parler, ou se révéler directement, immédiatement, sans médiations.
Cela étant l'islam ne saurait se soumettre à  un cadre d'élaborations discursives qui ne vient pas de lui et qui ne correspond pas à son génie propre. La mort de Dieu n'est pas un problème pour l'islam, puisque pour lui Dieu ne saurait mourir, d'aucune façon. Alors comment l'islam reçoit la culture héritée des lumières, et celle héritée de la modernité? Comment l'islam fait face à la mort de Dieu proclamée par Nietzsche ? Comme l'islam intègre ce donné fondamental, qu'il nous plaise ou pas, de la culture occidentale? Une piste pour une réponse est à trouver dans l'œuvre de Mohammed Iqbal un des rares à avoir osé penser cela dans le champ musulman.

vendredi 10 décembre 2010

L'école encore.

Pour contrebalancer le courrier d'hier, un autre son de cloche, la vérité doit se trouver entre les deux.
http://www.causeur.fr/pisa-le-classement-qui-gene,8054

Une remarque. C'est une manie agaçante d'appeler les professeurs, des enseignants, les infirmiers, des soignants, pourquoi par aussi des coiffants, des peignants, des soudants, des cuisinants? "Le personnel peignant du salon d' à côté est vraiment de bonne qualité", par exemple. La langue s'administratise, se capitalise, se V.R.pise, puisque tant et si bien, tout suit le même courant, et la langue n'est qu'un miroir des temps.

Un enseignant est un professeur avant tout et en face de lui il y a des élèves et pas des enseignés, ou des enseignables.

jeudi 9 décembre 2010

L'école, Marine Le Pen, et la télévision

Je reproduis ici un communiqué du parti de l'In-nocence, sur l'enseignement. 
Communiqué du parti de l'In-nocence sur le rapport de l'OCDE à propos de l'éducation et sur ses commentaires (2)
Le parti de l'In-nocence revient sur son effarement quant aux réactions que suscitent, dans les cercles médiatiques et sociologiques habituellement concernés, le rapport de l'OCDE à propos des résultats des différents systèmes d'éducation au sein des pays développés — rapport qui au demeurant participe déjà largement, lui-même, il convient de le noter, d'une vision décadente et biaisée des objectifs de toute éducation, réduite (l'excellent classement de la Finlande en atteste) à un idéal d'adaptation aux tâches aliénantes de la société marchande post-culturelle.

Le parti de l'In-nocence observe que les mêmes autorisés de parole qui ont déjà tant fait pour la mise à sac du système français affectent de voir dans le rapport une mise en cause salutaire du prétendu élitisme du système français, et des inégalités qu'il engendre. Plût au ciel qu'il en aille ainsi, ce qui donnerait à croire qu'est faite la terrible part du feu et qu'il demeure dans le système un noyau protégé ! Or c'est le contraire exact qui est vrai, toutes les politiques menées depuis trente ans et davantage ayant consisté, au nom de la lutte contre les inégalités, justement, à détruire ce qui, dans le système, fonctionnait encore à peu près correctement. À en juger par les commentaires des inamovibles experts prétendus, c'est à plus encore de la même politique qu'on doit s'attendre, le malade agonisant sous l'effet des saignées devant en subir indéfiniment de nouvelles, selon les meilleurs principes des médecins de Molière. Et M. le ministre de l'Éducation nationale ne rassure pas quand il déclare vouloir « un élargissement de l'accès à l'excellence ». Quelle excellence ? Il y a longtemps qu'il n'y a plus d'excellence : il n'y a que de l'un peu moins délabré. C'est avec lui que les experts entendent en finir. 
Ce n'est hélas que trop vrai, mais il s'agit, espérons-le, d'un crime inconscient. 


Sinon, passons à autre chose.Marine Le Pen, dit-on n'ira pas chez Michel Drucker, ni chez Laurent Ruquier, entendons : elle n'ira pas aux émissions qu'ils animent et orchestrent. Elle n'ira pas parce qu'elle n'est pas invitée. Personnellement, je m'en tape complètement, je veux dire, peut me chaut qu'elle aille s'asseoir sur le canapé rouge de Drucker, ou se faire cuisiner chez Ruquier. Ils ne l'invitent pas soit. J'avoue, qu'en soit, cela aussi m'est indifférent. Mais là où je commence à ne plus être d'accord, et où je commence à ne plus m'en moquer, c'est lorsqu'on entend leurs arguments.
Drucker ne veut pas la rendre sympathique, puisqu'il rend tout le monde sympa; mais Marine Le Pen, non pas question, pas elle. Besancenot oui, lui on peut le rendre sympathique, puisque, au fond, la révolution, c'est sympa comme tout, et le trotskisme c'est super sympa, on rigole bien avec cette gauche là, ils ont le sens de la fête. Mais Marine Le Pen, vous imaginez? Pourquoi la rendre sympathique alors qu'elle n'est pas sympa du tout, car le fascisme on le sait n'est pas jojo, ah non, et Marine Le Pen est fasciste car elle n'est pas sympa, à moins qu'elle ne soit pas sympa car elle est fasciste? On ne sait plus?. Mais on tourne en rond. 
Ruquier, quant à lui, choisit qui il veut, voilà ! Un point c'est tout, le dialogue est bouclé et le débat aussi.
Je ne suis ni adhérent, ni sympathisant du FN, cependant, puisque nous sommes dans un système de partis, et en démocratie, et que ce parti là, que je sache, n'est pas hors-la-loi, je ne comprends pas pourquoi Marine Le Pen, doit systématiquement être mise sur la touche, montrée du doigt, écartée du débat. Ici, il n'est question, après tout, que d'émissions de divertissement, et, pour tout dire, je trouve celle de Ducker, inepte - pourquoi les politiciens doivent-ils chaque dimanche défiler dans ce canapé?- et celle de Ruquier inconsistante, mais, puisqu'elles existent et quand on fait venir tous les tenants de la vie politique, il est normal, après tout, qu'ils y passent tous, sans exceptions.
Il en va de la démocratie et les amuseurs publics, payés par le contribuable, sont tenus de ne pas s'ériger, au nom de préférences personnelles, en arbitres du débat politique.

mercredi 8 décembre 2010

Et oui, ça continue...

Et oui ça continue...http://www.causeur.fr/ce-n%E2%80%99est-qu%E2%80%99un-debut-la-betise-continue,8051

Un air du temps

Une conversation, à bâtons rompus, dans un restaurant italien, entre la prise de commande et le plat de pâtes; des lectures, sporadiques, sur le théâtre français au XVIIe, sur le caractère fini de l'univers, le journal de R.C., que j'abandonne finalement - décidément, ce journal, en dehors d'un intérêt sociologique, tout relatif, n'en a que peu - l'une ou l'autre chose encore, notamment la Vie exécrable de Guillemette Babin sorcière, de Maurice Garçon, mettent ma tête en surchauffe. Des notions, des concepts, comme on dit plus volontiers aujourd'hui, se croisent et s'entrecroisent, se heurtent, se mesurent aux commentaires de Facebook (commentaires souvent anodins, comme ça, où deux, trois vérités sont balancées de manière péremptoire, où sous forme dogmatique on décrète qu'il n'y a pas de dogmes, où la citation étend son empire, un empire approximatif, décontextualisé, ambivalent, morne, gris, sentimental, gnangnan, décoré de rubans bariolés, un empire de bons sentiments encore). "Société", "religiosité", "imaginaire", "rationnel", "foi", "dialogue", "sexualité", "morale", sont quelques unes des notions qui s'occupent en ce moment à m'ôter le sommeil.

Qu'est-ce que la "société"? Que recouvre exactement cette notion, toujours employée de manière presque absolue? Je ne réponds pas à la question, mais disciple de René Girard, je ne saurais y répondre sans faire participer le mimétisme, et donc sans relativiser fortement la notion. Relativiser, c'est toujours mettre en relation, découvrir un deuxième, un troisième terme et rompre, par ce fait, l'unicité de la position première. Relativiser c'est critiquer, et critiquer c'est distinguer, c'est sortir de la confusion, c'est séparer. La Création, et tout acte créateur, est essentiellement critique, distinguant, relatif... Le mimétisme tend à tout confondre, à uniformiser, à aplatir, à coaguler, à fédérer, à souder en un amalgame indistinct tout et chacun, la société est, parfois, le résultat tolérable de cette opération intolérable.

Qu'est-ce que la "religiosité"? Un sentiment vague, un émotion en réalité, qui ne trouve aucun fondement dans l'intelligence, aucune logique interne ou externe, mais vit en totale dépendance des passions - au sens médiéval du terme. La religiosité est quelque chose de diffus, de vague, de volatil, de chaotique presque; et nous sommes une nouvelle fois renvoyés au mimétisme. Notre société est souvent atteinte de religiosité sans être religieuse.

Qu'est ce que l'imaginaire et le rationnel? Quelle différence entre eux? Le rationnel est-il toujours rationnel justement? Ne peut-on pas envisager de faire entrer de l'imaginaire dans le discours "rationnel" pour le rendre intelligent? Ne peut-on pas pour comprendre les choses les penser "imaginairement", en images, par l'image?
La rationalité est-elle toujours que concepts purs? Abstraction ? Sachant que l'abstraction par excellence ce sont les mathématiques, qui ne traite de rien de concret, car rien de moins concret qu'un nombre, le chiffre 5, en soi, est pure abstraction, mais cinq oranges, voilà du concret, voilà aussi du visuel, voilà du palpable, mais aussi de l'imaginable, et du pensable. La pensée rationnelle pense toujours par représentations.

Qu'est-ce que la sexualité? L'agitation du bas-ventre? N'a-t-elle rien à faire avec la pensée justement et avec les images? N'est-elle pas représentation? N'est-elle pas théâtre? N'est-elle pas dialogue entre réel et imaginaire? N'est-elle pas affaire d'âme autant que de corps? N'est-elle pas psychologique autant que physique, voire plus psychologique que physique? N'est-elle pas en somme irreprésentable?

Et la "morale"? Qu'est-elle? Une charte de bonne conduite? Une constitution de respectabilité? Un code de vie en société? Quoi? Est-elle irrationnelle? Est-elle imaginaire? Est-elle le fruit relatif d'une société donnée ? Relative doublement alors? En raison de ce qu'elle serait et en raison de la relativité de la société. Qu'est ce que la morale? Une maxime universelle, un impératif catégorique, une éthique, un pacte, un traité, des lois?
Et la morale est-elle fondamentalement religieuse? Et la sexualité échappe-t-elle à la morale? Oui mais qu'est-ce que la morale? Est-elle nécessaire? Dépassée? Quoi?

Entre la philosophie et la théologie, se trouve une "science", un savoir, un discours, que l'on appelle "théologie première", cette "science" veut établir les possibilités de construire une théologie donnée. Ce discours est essentiellement critique : il passe au crible, avec les outils philosophiques, ce qui est nécessaire à fonder une théologie : l'existence de Dieu, la possibilité qu'il a, ou non, de créer, de se révéler, la Révélation, et au final l'Incarnation, mais aussi, la possibilité pour l'homme d'arriver rationnellement à postuler l'existence de Dieu, d'admettre une Révélation, et en quels termes. La théologie première est, si l'on veut, la charnière entre Dieu inconnu, invisible, caché, improbable, et l'homme connu, visible, exposé, probable : un discours de la rencontre. Cette théologie première, fondamentalement critique, est propre au christianisme, bien qu'amorcée dans le judaïsme, et comme telle, ne requiert nullement la foi.
C'est la position que j'adopte ici : critique, relative, dialoguante, entre connu et inconnu, montré et occulté, probable et improbable; une position paradoxale, une concordance des contraires. Je n'ai que faire de la religiosité, pas plus que de la société comme absolu, concepts qui, en réalité, évoquent peu de choses, si ce n'est le brouhaha agacé et agaçant que fait un vol de mouches les après-midi d'été.

mardi 7 décembre 2010

Des sorcières, et du phallus.

Au hasard d'une errance télévisuelle, comme il m'en arrive parfois, par ennui, par lassitude, ou simplement pour voir si quelque chose de la bêtise ambiante a changé dans la boîte noire, j'entends parler de sorcières au Moyen Âge, sur Arte, la chaîne qui veut du bien à votre cerveau. Les cas d'ensorcellements, de possessions, de crises démonomaniaques, de transes et convulsions, sont enfin élucidés : l'ergot du blé, ce champignon hallucinogène et redoutable est le grand responsable. Tout cela en fait n'était que démonomanie fongique si on peut dire. L'explication est nette, claire et précise, et par le même coup est démontré, une nouvelle fois, la stupidité du Moyen Âge, et de ses prêtres, toujours prompts, comme on le savait déjà, à trouver des explications métaphysiques, là où il n'y avait qu'une cause naturelle. L'ennui est que les chasses aux sorcières ont surtout eut lieu, comme n'importe quel historien sérieux le sait, aux XVIe et XVIIe siècles - le Moyen Âge à bon dos - et que l'explication par l'intoxication à l'ergot de blé, si elle est valable dans certains cas, n'est pas opérante dans tous les cas, il faudrait, quoi qu'il en soit, le démontrer. Cette explication scientifiquement simpliste ignore l'impact sociologique et symbolique des cas de possession et de la sorcellerie dans les périodes précitées. En définitive, l'ergot de blé est une espèce de rouleau compresseur qui détruisant le dia-bolique, détruit aussi le syn-bolique pour ne donner de la réalité d'une société donnée qu'une explication de fond de tube à essai, tube que l'on aura au préalable agité, comme la bouteille d'orangina, car, on le sait bien, la pulpe est dans le fond. Arte, donc, procède aussi, par agitations oranginesques, ou par impressions canadadryesques si l'on préfère : ça ressemble à de l'information, mais cela n'en est pas, ça ressemble à de l'histoire mais cela n'en est pas.

Sur une autre chaîne, TEVA je crois, on parlait de phallus. Et qu'entend-on? Le fameux refrain - qui commence à sentir mauvais - de la culture judéo-chrétienne, cette entreprise à culpabiliser, à châtrer. Une voix off, nous apprend que notre civilisation ne représente pas le phallus, contrairement à la japonaise qui en place à tous les coins de rues. Outre que les Nippons ont une chance incroyable de pouvoir contempler des phallus bouffis et bien rouge lors de leurs promenades quotidiennes, ils ont l'heur de pourvoir vouer un culte dument religieux à l'organe. Quel peuple bienheureux tout de même ! Nous faisons piètre figure avec nos vierges encapuchonnées, enfin, je dis nous, je parle des zélateurs catholiques ici. Oui, il fait bon vivre au pays du soleil levant : vous pouvez allez faire brûler votre bâtonnet d'encens devant votre phallus préféré, petit ou long, gros ou plus svelte, bouffi ou émacié, ridé ou lifté, rouge ou noir - ça me fait pensé à quelque chose, mais je ne sais plus à quoi -; on aura compris les Japonnais, mais on le savait déjà, sont total décoinços, cool, pas bégueules pour un sous et ayant les idées larges. Mais tandis que brûle l'encens devant le fétiche - car c'est de cela qu'il s'agit - l'Amérique puritaine, protestante, chrétienne donc, consomme, comme nul par ailleurs, des images pornographiques, où phallus se dressent plus que cheveux sur la tête à Samson. Paradoxal tout de même ! Mais voyez la différence, le phallus japonais est installé, rigide et rutilant, dans son jardin public à la vue de tous, symbolique, tandis que le phallus américain, réaliste, toujours relié à un corps, est consommé, honteux et en privé. La faute à qui ? hein? A la culture judéo-chrétienne, tiens ! Pas de phallus ? La faute au christianisme ! Trop de phallus? Toujours la faute au christianisme. Phallus mou? Le christianisme. Trop dur? Le christianisme encore. Décidément.



Pourtant, comme je le montrerai dans un prochain courrier - au sens de chronique - , le phallus n'est pas absent du christianisme.

lundi 6 décembre 2010

Paternatalophobie

Noël, on le sait, est, de ce côté-ci de l'Europe, la période des dindes et des canards. Les malheureuses bêtes sont sacrifiées pour satisfaire la gourmandise et les délectations de bouche de beaucoup d'entre nous. On ne saurait, à vrai dire, se satisfaire d'un Noël sobre, non mercantile, plus proche de l'esprit de cette fête chrétienne. Mais qui se préoccupe de l'esprit de la fête, pourvu que dindes dindonnent, que cloches sonnent, que foie gras grassonnent et que champagne fasse digérer tout cela.




Tandis donc, que dindes trépassent, un autre personnage du drame natalice, passe et repasse : le Père Noël, ce lutin, ce troll, devenu grand et gros, qui, en grandissant et en prenant du ventre,  a volé le rouge du vêtement de Nicolas, évêque, et, dans la grande Amérique,  jusqu'à son nom. Le Père Noël est un voleur. Et il continue à voler, à vous voler vous, et à voler vos enfant, à voler les illusions de vos enfants. On aura compris, je suis atteint de paternatalophobie ou pour mieux dire de christogenopaternalophobie et inutile d'aller me dénoncer à la HALDE, ou à je ne sais quelle instance traquant la moindre manifestation phobique mieux qu'Inquisition ne faisait en son temps lorsqu'elle chassait l'hérétique. Inutile, vraiment, car cet affreux Jojo, est bien de chez nous, il a le teint clair, rosé même, n'est jamais au chômage, habite quelque part dans le Nord, où il  possède même tout un village, avec des serfs qui travaillent pour lui. Ah voilà bien quelqu'un qui ne sait pas ce qu'est une cité du nord de Paris - de toute façon, on ne l'y attend pas. Le Père Noël, est le plus grand capitaliste qui soit, un esclavagiste en plus et un misogyne. Il a bien une femme, mais qui la voit? Hein? Elle est retenue à la maison, devant sans doute, préparer la soupe, lui laver le linge, le repasser, nourrir les rênes, les étriller, bref, jouer à la fée du logis, tandis que l'autre est sensé parcourir le monde.
Ah, on peut le dire, Monsieur Noël a trouvé le filon. Après la guerre, il s'est invité chez nous, et comme font les vampires, il suffit que vous lui ayez ouvert une fois votre porte, pour qu'il revienne l'année d'après sans que vous lui ayez rien demandé. Il est comme ça le Père Noël, il revient toujours. Mieux, c'est lui qui le premier, à mis au point le clonage. On le voit partout, partout, pas toujours très ressemblant d'ailleurs, mais tout de même, pour un être humain, pas encore arrivé au terme de son développement, le change est donné.
Avant qu'il n'apparaisse, multiple et ubiquiste, nous possédions d'autres personnages de Noël. L’Espagne recevait ses cadeaux des Rois Mages, l'Italie de la Befana ( le nom de cette sorcière vient d’Épiphanie), le Portugal, de l'Enfant-Jésus, la Belgique, une partie de la France, de Saint Nicolas. Mais le Père Noël a tout balayé. Oh, il y a de la résistance en Italie et en Espagne surtout, et Belgique, pays du compromis, Saint Nicolas et le Père Noël, coexistent tant bien que mal,  ils ne sont toujours pas arrivés à un accord satisfaisant cependant et on craint le pire : que le brave Nicolas soit tout simplement évincé, qu'il ne devienne qu'une éminence rouge, sans mitre, sans crosse, sans croix, sans tout ce qui pourrait rappeler ses origines chrétiennes, qui, comme on le sait, est une horreur pour nos temps de multiculturalisme à sens unique.

Ah non, je n'aime pas le Père Noël. Je n'aime pas que l'on fasse croire aux enfants que cet individu sans vergogne existe et leur veut du bien, je n'aime pas que l'on sacrifice, bêtement, sous le patronage du Lutin Rouge, aux rites des cadeaux, avec comme devise " Plus c'est gros, plus c'est beau". Je n'aime pas, non, que l'on détourne ainsi le bel esprit de cette fête, si simple en réalité, en prétexte idiot à la dépense, aux allées et venues somptuaires, je n'aime pas que l'on fasse de ce temps le grand moment de la consommation, alors qu'il devrait être celui du don, et du don de soi, pour commencer, que le présent offert symbolise.

Je souhaite la mort du Père Noël, opium des gosses, et jouissance stupide des adultes qui, en quête de leur âme d'enfant, s'émerveillent de voir leur progéniture se réjouir ou pleurer à l'apparition du Patron de la Fête.

Et dire que toute cette histoire avait commencée par un couple qui ne trouvait pas de place dans la ville pour se loger, d'un marmot couché dans une mangeoire, de bergers rustres, d'un ou deux anges à la limite. Une nuit, quelque part, au Levant.

jeudi 2 décembre 2010

De quelques principes en politique

La politique est la gestion de la "polis", autrement dit de la vie ensemble, de la communauté. Si la politique débouche sur l'action, et l'agir, elle ne saurait se limiter au pragmatique, au risque de devenir machiavélique, au sens technique du terme. La politique est donc d'abord fondée sur une éthique au sens large du terme, et une éthique comporte quelques principes.

Parmi les principes fondateurs du politique, pour ma part, je pose en premier, l'intérêt pour la personne. "Personne" étant ici compris non pas comme individu, mais comme sujet responsable, capable de droit et de devoir, respectable et absolument inaliénable. Le respect de la personne doit aller du début de son existence à la fin de celle-ci, de sa conception à sa mort. Si la naissance marque le début de l'existence d'une autonomie relative de l'individu, la conception marque celle de la personne, qui n'a pas besoin d'être autonome pour être comme personne.

Un autre principe est de poser le bien du plus grand nombre, avec une attention constante aux plus faibles. Une politique ne peut chercher les biens particuliers, individuels ou de groupe, mais œuvrer pour le bien commun, c'est-à-dire, celui du plus grand nombre. Le bien commun ne peut être atteint que si l'on reste attentif aux besoins des plus faibles de la communauté.

Un principe supplémentaire est de rechercher la vérité, et de pouvoir en toute sérénité nommer les choses, sans peur et sans respect humain. Le discours politicard fait un tord considérable à la chose politique, aux personnes, au bien commun.

Un autre principe pourrait résider dans cette notion "inventée" par Renaud Camus : l'in-noncence, au sens d'absence de nocence. Ne pas vouloir, ni rechercher, mais éviter la nocence, est dans le droit fil de la recherche du bien commun. La nocence étant une plaie de l'ordre du machiavélisme que la politique doit normalement combattre.

Enfin, un dernier principe, pour l'instant, est la relativisation de l'État, autrement dit sa mise en relation avec la communauté. L'État n'est pas un absolu, il est pour la communauté, et non la communauté pour lui. L'État est un moyen, et non pas une divinité, dans ce sens il ne possède aucune transcendance, et n'est supérieur à la communauté, qu'en termes de moyens.  De plus, l'État ne saurait se confondre avec qui que se soit, et n'être assimilé à rien.

L'amour encore l'amour

Quelques précisions supplémentaires sont nécessaires à ce qui a été dit sur l'érotique, sur l'érôs. La notion peut prêter à confusion.

Trois niveaux, il me semble, sont à distinguer lorsque l'on parle d'érotique, je ne dis pas d'érotisme, mais d'érotique. Le premier niveau est celui développé chez Platon : l'éros céleste, cet amour hautement moral, et mystique, qui, donc, procède par un mouvement ascendant, où l'âme cherche à rejoindre son milieu naturel. Il n'est absolument pas question ici de passion amoureuse, ni de mouvement lascifs, ni rien de charnel au demeurant, au contraire, l'érotique céleste est une tentative de sortir du charnel précisément.

Un deuxième niveau est celui, opposé au premier, que les anciens appelait l'éros vulgaire, l'éros d'en-haut. Il est ici question de mouvement charnel, de désir poussant à jouir du corps de l'autre, voire d'indécence. Le mouvement n'est pas ascendant, mais pas descendant non plus, il est purement vertical, l'âme restant engluée dans la matérialité de la chair.

Un troisième niveau enfin, comme tel ignoré par la philosophie antique, mais inauguré par des mouvement religieux, notamment les rites à mystères, et la gnose hérétique chrétienne, est constitué par une compréhension de l'érotique comme mouvement, qui de la chair, de la prise en compte de la chair, veut s'élever vers le haut, vers le monde spirituel. Dans ce mouvement, la chair n'est pas forcément perçue comme positive, elle est considérée comme indifférente, et comme indifférents ses mouvements, persuadé que sont ceux qui adhérent à cette perception, qu'ils sont de nature essentiellement pneumatique, spirituelle, et que, pour eux, la chair et ses passions, ne saurait aucunement les atteindre. Nous sommes ici dans une position élitiste. C'est la postérité de ce niveau, qui va donner naissance à l'érotisme, au sens moderne du mot : défini comme "carnalité" spiritualiste, car contrairement à la pornographie, l'érotisme, tacitement, conserve un motion spirituelle, non pas au sens de la religion, mais au sens, de primat de l'esprit. L'érotisme est ainsi une tension entre une expression charnelle et une primauté de l'esprit, une tension contenue toute entière dans la visée que l'on se fait précisément de la chair. La tension n'est pas entre le corps et l'esprit, positionnement facile et habituel, mais entre la chair et l'esprit, la chair n'étant pas adéquatement le corps.


Il serait intéressant de faire le point sur la notion de "chair" justement, mais ceci est une autre histoire.

En conclusion, lorsque l'on parle d'érotique et d'érotisme, il faut savoir à quoi précisément l'on fait référence. Le christianisme n'a pas fait de l'érôs sont mobile central - celui-ci appartenant à la philosophie grecque- mais néanmoins il a dû, au long de son histoire, composé avec ce mobile érotique, et, pour une part, l'adopter. Reprocher au christianisme de ne pas être érotique, c'est lui faire un mauvais procès, comme si on reprochait aux poules de ne point voler.

mercredi 1 décembre 2010

L'amour toujours l'amour.

On le sait, c'est même devenu une rengaine, l'amour est  le coeur même du christianisme. Ayant dit cela, nous n'avons encore rien dit, car il y a amour et amour. Je ne me parlerai pas ici de psychologie, de ce qu'au Moyen Âge il était coutumier d'appeler "passions", terme qui, de nos jours, a pris, sensiblement, une autre signification, le romantisme étant passé par là. Non, je parlerai uniquement de philosophie.

La philosophie grecque, celle de Platon surtout, parle aussi d'amour. Le Banquet en est plein et de belle façon. Dans ce dialogue platonicien, il est question, autant que dans l'Évangile, d'amour. Chez Platon l'amour prend le nom d'erôs, qu'il serait tout à fait erroné de ramener à une quelconque lubricité ou sensualité, non, il s'agit ici de l'erôs céleste a distinguer soigneusement de l'erôs vulgaire. Qu'est-ce qui caractérise fondamentalement l'amour erôs? Sa dynamique ascendante. L'amour "érotique" est un désir qui pousse le moi vers le haut, vers le monde idéal auquel naturellement il aspire, vu que son âme est de la même essence que celle de Dieu. L'amour "érotique" est donc un mouvement naturel qui attire vers en haut, qui part du bas, du terrestre pour aller vers le céleste, comme la colombe qui retourne au colombier. Le chemin d'amour platonicien, et la morale qui en découle, est une voie ascétique, qui me conduit à me défaire du matériel, du sensible, pour me spiritualiser, me désensibiliser et parvenir ainsi à la communion du monde divin, vers lequel porte mon désir. Et cela aussi, c'est de l'amour.

L'amour des Évangiles s'appelle, quant à lui, l'agapè, et sa dynamique est autre. En effet, l'agapè prend sa source en haut, en Dieu, et descend vers le bas, s'abaisse. L'amour évangélique est avant tout abaissement, il s'agit du mouvement, tout à fait spontané, aucunement contraint par la nature, de Dieu qui aime tout homme, et particulièrement ceux qui en ont le plus besoin, à savoir, ceux qui, au regard d'une morale du mérite, seraient les plus indignes d'amour. L'agapè est amour inconditionnel et sans retenue qui vient d'en haut pour se répandre dans le sensible, et dans le matériel. L'amour de l'autre, dans le christianisme, est ainsi fondé dans cet amour d'agapè. Me sachant aimé premièrement et spontanément par Dieu, me sachant aimé d'en haut, d'ailleurs, quoi qu'il en soit, j'aime à mon tour de cet amour-là, sans attendre récompense, sans désir de rétribution. Le seul motif de l'agapé, c'est l'agapé, à la gratuité, la gratuité répond. Et cela aussi, c'est de l'amour.

Erôs et agapè, sont deux mobiles amoureux qui conditionnent deux discours et deux représentations du monde et des rapports entre, d'une part, le haut et le bas, et d'autre part, entre les hommes. De ce point de vue, la vision chrétienne de l'amour est radicalement nouvelle et, à ce jour, totalement inédite. Lorsque, par exemple, on applique les mobiles de l'amour à l'islam, on est conduit à cette analyse. L' amour que le Coran connaît, est celui de Dieu Miséricordieux, par nature, avec les croyants et ceux qui observent les dires du prophète. Un Dieu donc qui rétribue, qui est bon avec les bons, et qui punit les méchants. Cela n'est pas l'agapè, ni même l'erôs, mais une vision d'un certain amour fondé sur le nomos, c'est-à-dire sur la loi. Le Coran donc, montre un Dieu qui aime de manière conditionnelle, dont l'amour est lié à l'observance d'une loi. Le Coran, en islam, n'est pas la seule source qui pourrait nous faire entrevoir l'amour, il y aussi, par exemple, le soufisme. Même si ce courant est hérétique aux yeux de l'islam orthodoxe, il est cependant intéressant de constater, précisément, que le discours à propos de l'amour de Dieu change. Nous sommes ici, dans le mobile érotique. Puisque le soufi, par une discipline et des rites, doit s'élever jusqu'au monde divin. Le mouvement est caractéristique de l'érôs céleste : c'est le moi, illuminé, qui va vers le haut. Il n'est aucunement question de mouvement descendant. L'amour soufi est un amour "érotique". On pourrait poursuivre encore longtemps avec d'autres exemples.

L'amour "agapique", l'agapè est le mobile fondamentale du christianisme, sa marque de fabrique et le mouvement secret qui a marqué profondément notre culture occidentale. La nouveauté de ce mobile, a été telle que, même pour les tenants officiels du christianisme, il a été difficile de maintenir l'agapé pure et intacte de toute synthèse avec le nomos, d'une part, et l'érôs, d'autre part. Selon les époques on a procédé, inconsciemment, à des négociations des différents mobiles, cependant, malgré tout, la nouveauté de l'amour d'agapè à toujours prévalu. Il faut juger le christianisme à la lumière de ce qui fait sa spécificité : l'agapé.

Pour finir, il y a un autre amour, celui de la philia, amour d'amitié, qui n'est ni érotique, ni agapique, mais fondé sur la réciprocité, l'échange, et la poursuite du bien. Il s'agit d'un amour moral ou le bien seul est recherché. Il participe à la fois de l'érôs céleste, et à la fois de l'agapé, quand, toutefois, il met un ou des chrétiens en jeu. Mais c'est une autre histoire.