dimanche 18 septembre 2011

De la Norvège et de la haine.

Au XIXe siècle, à la faveur d'un mouvement contre-révolutionnaire, lent et diffus, le catholicisme reprenait du poil de la bête et connu jusqu'en 1945, environ, ses dernières heures de gloire. Depuis, le christianisme est tombé, sur notre continent, médiateur du désir des autres, en désuétude, frappé de ringardise. Pire, il est devenu en l'espace de deux ou trois générations parfaitement incompréhensible à des personnes non seulement issues de lignées jadis informées par le christianisme, mais encore largement nourries par des valeurs chrétiennes, confusément chrétiennes, mais chrétiennes à leur racine, tout de même. Aujourd'hui donc, le christianisme est prié de quitter l'espace public, et le catholicisme, constamment moqué, est pratiquement frappé d'interdit.

Cependant, qu'il en est ainsi pour la vieille religion matrice de notre culture, il n'aura pas échappé aux regards de l'observateur impartial, que l'islam, quand à lui, gagne du terrain. Non seulement numériquement, par le jeu simple et conséquent de la natalité, mais aussi idéologiquement. Il ne s'agit pas ici de conversions, qui restent somme toute épisodiques, tant l'homme occidental n'a aucunement besoin de Dieu, il est son propre dieu, mais en raison de l'opinion médiatique et de certaines "élites". En effet, pour ces dernières l'islam est une religion non seulement respectable, mais à respecter, et à respecter plus qu'une autre, il semblerait. Tandis que l'on peut s'en prendre facilement au christianisme, signaler la place qu'il aurait eu dans la naissance d'une culpabilité typiquement occidentale, faire remarquer qu'il est à l'origine de l'antisémitisme, qu'il est liberticide, qu'il est patriarcal et machiste, qu'il est pudibond, qu'il est, selon certains, et le cas de la Norvège, semble leur donner raison, mortifère, les mêmes choses, exactement les mêmes choses, ne peuvent être dites sur l'islam, sauf à passer pour islamophobe, crime en train de devenir majeur.
Une véritable omerta est en place. Il est interdit de parler de l'islam sinon en termes convenus, lénifiants, déjà entendus, où, banalement, tous les lieux-communs sont priés de se présenter. Il est impossible dans nos démocraties de porter un regard critique sur cette religion, à moins de passer pour un raciste, un fasciste, un ennemi de l'humanité, toutes choses contenues dans le fameux "islamophobe".

Dans ce contexte, l'affaire de la Norvège, cette odieuse tuerie, œuvre d'un dérangé franc-maçon - car il est bien franc-maçon - appartenant sans doute à une frange d'un christianisme ésotérique quoique fondamentaliste ( car "chrétien fondamentaliste" cela ne veut pas dire grand chose, un intégriste catholique par exemple est-il fondamentaliste? Le fondamentalisme en christianisme a une définition précise, et je doute que les journalistes ai utilisé ce terme avec justesse) illustre dans ses retombées médiatiques ce qui vient d'être dit. Le tueur était blond, jolie figure, une espèce de diable déguisé en ange de lumière, et le mal vient par lui, par lui Norvégien de souche - on nous l'a assez dit, répétition symptomatique -, par lui que sa généalogie idéologique rattache au christianisme, par lui qui clame sa haine de l'islam. Les racines du mal, que ce cas tragique illustre, sont l'expulsion, du discours, du christianisme. En effet, le discours courant, de l'opinion, médiatisé par la presse, et certaines figures politiques, fonctionne comme une scène de laquelle on a expulsé, lorsqu'il s'agit de religion, le christianisme, en faveur - ce n'est sans doute pas intentionnel- de l'islam. L'expulsion est une violence. Il s'agit ni plus ni moins du rite du bouc émissaire. Les Hébreux chaque année choisissaient un bouc qu'il chargeaient symboliquement des péchés de la communauté et ensuite il l'expulsait, l'envoyait périr au désert avec les péchés du peuple.
Nous agissons de même avec le christianisme, après l'avoir chargé de tous les tords qui nous tourmentent, nous l'avons expulsé de la scène pour l'envoyer crever dans le désert du non-sens. Expulsé le christianisme n'en demeure pas moins présent dans ses valeurs que nous avons si bien intégrées que nous les exerçons abusivement : tolérance, ouverture à l'autre, respect, liberté. Nous avons été si bien formés que la critique n'est plus possible que retournée contre nous, nous livrant ainsi à une masochisme flagellant donc nous accusions le christianisme d'en être la cause; absent nous l'accusons toujours et regardons avec une tendresse doublée de curiosité cette "nouvelle" religion qui, culturellement, ne faisait pas partie de notre horizon. Une religion au dogme simple : Dieu crée, dit, ordonne et juge, et Mahomet nous le fait savoir, et donc très loin des nuances et des dialectiques chrétiennes.

Si la critique de l'islam est difficile, ce n'est pas en raison de l'islam lui même, islam donc l'opinion, globalement, n'a rien à cirer, mais c'est en raison qu'il y a des gens qui le professent. Des millions de gens, ad intra et extra, et l'on ne sait si cela explosera ou non. S'il ne s'agissait que d'un système d'idées et bien l'on en débattrait comme l'on débat ouvertement d'autres systèmes, mais il ne s'agit pas de cela, il s'agit de la force numérique en présence, qui, d'une certaine manière nous baille la bouche.

J'ai toujours été pour un dialogue, non seulement pour des raisons humanistes, mais parce que le non-dit est toujours violent à un certain moment. Je suis donc pour un dialogue avec l'islam. Mais un vrai dialogue, où les interlocuteurs soient prêt à se dire tout ce qu'ils estiment devoir se dire, sans censure, avec la possibilité de critique. Je refuse que l'on dialogue avec comme pré-requis une expulsion, qui est la première violence et qui risque d'en entraîner, par mimétisme, d'autres. La différence n'est un danger que dans le refus de voir la différence. L'indifférenciation est toujours, comme nous l'enseigne René Girard, porteuse de violence, et parfois de très grande violence. Je ne veux pas céder ma place ni livrer ma vie à la violence, je n'ai jamais aimé la loi du plus fort, cette loi est odieuse.

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