mercredi 2 novembre 2011

Pipi-Jésus ou les fluides de l'art-contemporain.

La semaine sainte commence, et à Avignon, en la Fondation Lambert, dédiée à l'art-contemporain, on croit aux miracles... Une oeuvre fait scandale, une oeuvre pourtant déjà connue, Piss Christ d'Andres Serrano : un crucifix comme il en existe tant est plongé dans un récipient contenant de l'urine. La métaphysique est abyssale et la portée du "geste" est proprement transcendante... de quoi retourner un cerveau, je vous jure.
Y a-t-il blasphème? Pour le performeur, s'il n'a pas la foi, il ne saurait y avoir blasphème; pour lui le crucifix est un objet lambda ayant, à la limite, mais pour d'autres, une valeur religieuse. Le blasphème ne peut se définir qu'en rapport à la foi. Y a-t-il manque de respect pour les valeurs d'autrui? Certes, oui. L'art peut-il tout faire, tout dire, autrement dit est-il exempté  de morale? Certains le pensent. La question est délicate. Personnellement, je ne pense pas que l'art est une espèce de zone franche où tout peut être fait, dit, exprimé. D'ailleurs le droit va dans ce sens, puisqu'il affirme l'indisponibilité du corps humain même pour l'art. L'art donc est soumis à des restrictions morales. Qu'en est-il du rapport de l'art à la religion, ou au sacré, ce qui n'est pas la même chose. A l'artiste on ne peut demander, ni la défense des idées religieuses qui ne sont pas les siennes, ni la neutralité pour des idées qu'il ne partage pas. On ne peut pas plus lui demander le respect du sacré, chose qui, peut-être pour lui ne veut rien dire. Mais on peut sans doute lui demander un minimum de respect pour ceux qui croient.



Si heurter ou provoquer est le seul but d'une oeuvre, si bousculer les idées religieuses de certains est le seul but d'une performance, alors l'oeuvre elle-même ainsi née ne mérite pas plus de respect que celui qui fait défaut à  l'artiste. Une oeuvre ne se définit pas seuleument par sa capacité à provoquer. Il semble pourtant que ce fait constitue le fin fond de certaines attitudes en art-contemporain.
Le Piss Christ est sans doute de celles-là. Personnellement, je n'attache aucun importante à cette oeuvre-là, qui n'a de "valeur" qu'en fonction de sa provocation. Je n'y vois pas non plus un blasphème. Mais un signe de bêtise et j'exprime une fin de non recevoir ce geste qui ne me dit rien, ni sur le sacré, ni sur l'homme, ni sur l'art. Plonger un objet dans de l'urine, après tout, est d'un niveau enfantin, et quand bien même cet objet serait un crucifix ou une madonne de Lourdes, cela ne change rien : on pratique l'ondinisme imaginaire, une image de type sacrale immergée dedans le produit de nos reins - après tout Dieu sonde les reins et les coeurs - pour produire une nouvelle image, qui en soi n'est pas dénuée de beauté (le canada dry aurait fait le même effet). Mais voilà s'il n'y avait le symbole, ce fameux symbole plus réel parfois que le réel lui-même. La nouvelle image est fétichiste, insultante, et idolâtre. Et c'est en raison de cela, que des chrétiens sont heurtés par l'image produite, fruit de l'artifice. Cela dit, fallait-il la détruire? Certes non. La détruite c'est lui donner une importante qu'elle n'a pas. Et puis, je rappelle aux bonnes âmes catholiques, que le Christ, s'il n'est pas descendu, dans nos excréments, est descendu dans ce qu'il y a chez nous de plus abject, dans les enfers de nos vies, du monde, et de l'art.

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